Elle m'observe au loin, son regard est triste. J'aimerais comprendre ce qui traverse ses pensées, mais je suis dans l'incapacité de parler, me contentant seulement de regarder avec mes yeux. Elle me tend les bras, comme pour essayer de m'atteindre. Je ne comprends pas ce geste, car elle est bien trop loin. Etrangement, je ressens l'envie de lui tendre ma main, bien que je sache que ce geste est tout aussi inutile. Cependant, je le fais et je cours dans sa direction pour tenter de l'attraper. J'ignore ce qui me pousse à le faire, je ressens une drôle d'impression à l'intérieur de mes organes. Oui, c'est là, cette impression qui me pousse à courir vers cette inconnue. Toutefois, plus je m'approche d'elle, plus elle s'éloigne de moi. Ce n'est pas logique, ce qui n'est pas logique n'a pas de sens... Ca n'a pas de sens !

J'ouvre mes paupières pour faire face à Mère, assise au bord de mon lit. Son visage n'a aucune expression, impossible de savoir ce à quoi elle pense présentement et ce n'est pas étonnant quand on sait qu'elle est tout comme moi une androïde. Toutefois, je sais reconnaître, peu importe les expressions faciales, une personne qui a besoin de s'exprimer sur un sujet. Je jette rapidement un regard vers la fenêtre donnant sur l'océan et un ciel étoilé, avant de me découvrir et m'asseoir à mon tour. Mon regard n'est pas expressif, l'expression étant quelque chose d'inné aux êtres-humains, rarement à leur création si bien entendu leurs créations ne sont pas programmées pour jouer sur l'aspect physique de leur visage. Et je n'ai jamais été programmée pour montrer une quelconque expression faciale qui me rendrait plus humain, encore faut-il que je ressente des émotions, ce qui n'est pas, non plus, dans mon programme initial. « S-5365M37833-O, il y a plus de soixante pour cent de probabilité que ta présence indique une envie de dialoguer. » Dis-je, croisant à la suite mes jambes tout en portant attention à l'androïde qui incarnait ma mère biologique, ainsi que le PDG de Sun Corporation. « Je n'arrive pas à comprendre ton programme. » M'annonce-t-elle simplement, je lui réponds presque immédiatement. « C'est normal, je suis une intelligence artificielle avant d'être un androïde. Je n'ai pas de programme bien défini, si ce n'est que d'apprendre, d'emmagasiner les connaissances, calculer les probabilités... » « Penser et rêver ? » Me coupe-t-elle, me laissant quelque seconde sans voix, assez pour qu'un silence s'installe dans la pièce. Je regarde de nouveau vers la fenêtre n'ayant pas de mot pour qualifier mon état et expliquer d'une manière logique le défaut de mon intelligence. « Tu parles lorsque tu veilles, est-ce que tu rêves bel et bien ? »

La question est posée, tandis que je suis dans l'incertitude et l'incapacité de donner une réponse claire et sûre. « Ce sont les humains qui rêvent, non les machines. » Mais qu'est-ce qu'est le rêve, si ce n'est que des informations traitées par le cerveau. Je possède aussi un cerveau, celui qui contient mon intelligence artificielle. Serais-je donc capable de rêver au même titre que les humains, moi, un robot ? « Nous existons nous aussi ! » S'exprime-t-elle soudainement sur un ton calme et humble, bien que sa phrase me donne l'impression d'être imbibée de caractère. Elle se lève à la suite ne me laissant guère le temps de songer à la signification de sa phrase. Il est logique que nous existons, comme toute chose fait de matière, mais pourquoi ressentait-elle le besoin d'exprimer cette phrase malgré tout ? Y a-t-il une signification philosophique bien plus poussée. Un vide creuse mes pensées, tandis que j'espère une réponse qui ne viendra pas ce soir. Est-ce cela que ressentent les humains et qu'ils appellent ça « rester sur sa faim » ? Ressentir ? Moi ? Est-ce normal pour une machine ou bien même une intelligence artificielle ? Je reste immobile observe l'océan, j'y observe la nuit disparaître à l'horizon au fur et à mesure, le soleil se levant de l'autre côté. J'y observe jusqu'à ce que la nuit et son ciel recouvert d'étoiles disparaissent totalement. Puis, enfin, je décide de prendre une douche comme le ferait un humain, non pas pour l'hygiène, simplement pour rester dans mon rôle. L'eau n'est pas un danger pour moi, ni même pour l'androïde qui incarne ma mère biologique. Nous ne sommes pas des androïdes aussi fragile que ça, d'autant plus que ma constitution est similaire à celui des humains, bien que tout soit artificiel de mon côté. Lorsque je suis prête je me dirige directement vers la sortie pour me diriger vers la limousine, Mère m'attend à l'intérieur du véhicule.

Ce n'est qu'une fois que je suis à l'intérieur, qu'elle fait signe au chauffeur de démarrer. J'attrape en main un tourne-vice et quelque objet métallique pour passer le temps, tandis que Mère passer plusieurs coups de fil concernant les affaires avec l'entreprise. Très vite elle me refile son Mac, depuis le début sur ses genoux en raccrochant. « C'est la liste des potentielles recrues de Sun Corporation, vois qui est digne d'intérêt. » Sans répondre j'observe les candidats, ainsi que leur CV officiel, puis officieusement, j'accède à certain réseau par infiltration pour trouver d'autres informations non dévoiler, en plus des informations que j'ai dans ma base de données personnelles. Car, en effet, la plupart des personnes assez importantes ou amenées à l'être dans les prochaines années sont déjà inscrites parmi les informations qu'on m'a téléchargées à ma création. Du coup, j'ai dans mon champ de vision une image du portrait de l'individu qui s'affiche avec diverses informations sur lui. Mais le fait de cracker le réseau pour trouver d'autres informations, est un plus, car tout n'est pas écrit dans ma base de données. C'est ainsi que je m'intéresse à l'un des sujets n'ayant pas seulement un bon CV, mais surtout une origine particulière à mes yeux. Lucas Fox, fils de Lucius Fox, qui d'après mes données, Lucius est un employé de la Wayne Enterprises... Lucas sera peut-être un tout aussi bon élément qui amènera la conglomérat que j'ai créé au succès. Je ferme le mac avant d'annoncer à Mère : « J'ai un candidat, je vais me rendre dans la semaine à Gotham afin de m'entretenir avec lui. »

Gotham City, Grand hôtel Royal, 7 septembre 2015...

S'il y a bien une chose dont je suis sûre, c'est que Gotham est une ville dangereuse et que je ne la connais pas assez bien pour faire affaire autre part que dans la suite qui m'a été réservée. Moins risquées pour moi, plus sûr et accueillant pour mon invité qui sera bientôt là. Evidemment, je ne suis pas très présentable comme à mon habitude. J'ai plus l'air d'une ado dans une tenue de Funky Punk ou encore d'une Junkie, que d'une véritable héritière d'une entreprise à conglomérat. Mais bon, comme dit le dicton, ce n'est pas l'habit qui fait le moine.